Gustave Aimard (1818-1883) "Les hautes montagnes qui occupent le centre de l’île de la Guadeloupe et vers lesquelles, depuis le bord de la mer, le terrain s’élève peu à peu par marches immenses et magnifiques comme un escalier de géant, ont toutes été, à une époque reculée, des volcans redoutables. En effet, leurs laves sont encore amoncelées par blocs noirâtres et monstrueux, depuis leurs cimes chenues jusqu’aux sables du rivage. Et ce qui prouve clairement la vérité de cette assertion, c’est que, ainsi que nous l’avons rapporté plus haut, le sommet le plus élevé de ces montagnes, la reine de toutes les autres, la Soufrière enfin, bouillonne encore aujourd’hui avec un bruit formidable et lance incessamment d’épaisses vapeurs par les soupiraux de ses ténébreux abîmes. Ces hautes montagnes de la Guadeloupe sont toutes couvertes de forêts . forêts séculaires, primitives, où n’a jamais retenti le bruit de la cognée des bûcherons . que seuls connaissent les nègres marrons qui s’y réfugient, et quelques rares chasseurs de grives et d’agoutis. Ces forêts vierges servent de barrières et à la fois de ceinture aux mornes . elles sont presque impénétrables . des arbres gigantesques de tous les âges, couchés les uns sur les autres dans un pêle-mêle effroyable, pourrissent au milieu des arums qui les enveloppent et des lianes qui le couronnent." Suite et fin de "L'OEil-Gris".