Le titre du roman, Escal-Vigor, désigne un domaine imaginaire situé sur une île mi-celte, mi-germanique, où vient se réfugier Henry de Kehlmark. Héros inhabituel, Henry aime les hommes. À l'Escal-Vigor, il trouvera l'âme soeur en la personne d'un jeune paysan, Guidon, qui passe pour avoir «des penchants et des inclinations bizarres, pensant blanc quand les honnêtes gens pensent noir...» Avec Guidon et Blandine, amante passionnée, il vivra en vase clos, loin des médisances et des rancunes. Jusqu'au jour où le trio devra affronter la persécution des habitants déchaînés... Il y a dans ce beau roman, une dimension «révolutionnaire», car il fallait une certaine audace pour présenter l'homosexualité d'une manière si simple, naturelle et digne, en cette année 1899, seulement quatre ans après la condamnation de Oscar Wilde. L'auteur sera d'ailleurs poursuivi pour atteinte aux bonnes moeurs: le procès se déroule en 1900, de nombreux écrivains soutiennent Georges Eekhoud, et ce dernier sera acquitté.